Marie-France BAUD et Katarina CIRODDE
Directrice du bureau de Bruxelles et Chargée de mission, Confrontations Europe
Après les Pays de la Loire, Confrontations Europe est repartie en région, cette fois-ci à Bordeaux le 15 mars, pour débattre du Plan Juncker et de sa mise en œuvre avec les acteurs économiques, sociaux et financiers, qu’ils soient publics ou privés. Cette rencontre organisée en partenariat avec l’Agence Erasmus+, la Représentation en France de la Commission européenne et le ministère des Affaires européennes, visait à rendre plus accessibles les orientations de ce plan d’investissement pour l’Europe, dit plan Juncker. Comme l’a souligné Alain Rousset, président de région, l’innovation et la formation sont au cœur des projets de la grande région Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes et de sa capitale, qu’il s’agisse de numérique, d’énergie, de spatial, de transport, d’éolien marin ou d’éducation.
Et nous pouvons faire plus !
La période d’investissement effective du plan Juncker court jusqu’au 30 juin 2020 et les régions doivent saisir ces opportunités, aux côtés des entreprises, afin de profiter de cette nouvelle dynamique. « Sinon le plan échouera », avertit Jean-Louis Marchand, président de la Commission Formation de la FNTP. « Le pôle de compétitivité doit être un facilitateur, notamment dans l’accès au bon guichet de financement », explique Hervé Floch, directeur de la Route des Lasers. Les PME innovantes, comme Immersion, recherchent des financements qui les aident à franchir le fossé entre la recherche qu’ils mènent et l’industrialisation des résultats : BPI France, grâce au fonds EFSI, a développé des outils répondant à ces besoins concrets, sous la forme de prêts innovation(1) par exemple. « Coussin absorbeur de risques », ce plan peut aussi compléter les programmes des fonds structurels (Horizon 2020, Cosme), permettant ainsi aux ETI et PME de se moderniser. Des aménagements sont nécessaires concernant l’agrégation des petits projets et la mise en place de plates-formes d’investissement. L’enjeu de l’investissement humain apparaît également essentiel : en effet, cette dimension est source de progrès pour la compétitivité, comme l’illustre le cas de la PME Adam SAS(2). Cependant les entreprises ou établissements publics ont besoin de moyens pour donner aux salariés les capacités d’aborder les mutations auxquelles nos sociétés sont confrontées. Or les questions de normes, relatives à la comptabilité des entreprises et des États, peuvent être dissuasives. Par ailleurs les universités françaises, qui forment les générations futures, ne sont pas en mesure d’emprunter, ce qui les empêche d’accéder au Plan. Dans un contexte de crise économique, financière et du vivre ensemble, « l’objectif principal du Plan Juncker est de redonner envie d’Europe » clame Jean-Louis Marchand à juste titre : « C’est un projet politique qui vise à faire bouger l’Europe et l’ensemble des acteurs : la Commission, les entreprises et les acteurs financiers ».
1) Le prêt innovation vise à aider les PME dans la phase de commercialisation de l’innovation.
2) Adam SAS, PME dans l’industrie du bois, mène une politique d’innovation sociale continue, notamment par le biais d’une gouvernance centrée sur un management coopératif. Depuis 2009, l’entreprise a gagné 20 % de productivité directe, son chiffre d’affaires a doublé et son résultat d’exploitation quadruplé
Le Plan Juncker : où en est-on ?
Dans un contexte de profonde aversion au risque, le plan, lancé par le président de la Commission Jean-Claude Juncker en 2014, vise à relancer les investissements, surtout dans les infrastructures, les industries de demain, les compétences. Composé de deux volets — 75 milliards d’euros pour les PME et 240 milliards pour les infrastructures —, il s’articule sur le fonds européen pour les investissements stratégiques (EFSI), qui offre une boîte à outils aux porteurs de projets pour bâtir et financer leurs projets. Le groupe Banque européenne d’investissement en est le pivot. Parallèlement au volet financier s’est déployée la plate-forme de conseil EIAH, destinée à accompagner les promoteurs, et bientôt s’ouvrira le portail européen EIPP qui permettra à des porteurs de projets individuels de plus de 10 millions d’euros de trouver des investisseurs dans le monde. La mise en œuvre a été rapide, contredisant l’idée reçue sur la lourdeur administrative européenne : en 9 mois, 206 projets ont été approuvés dans 25 pays. Rien qu’en France, 18 projets ont été retenus en 2015, notamment dans l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables.
Marie-France BAUD et Katarina CIRODDE