Benedickt BENENATI
Vice-Président Digital Communications, Renault
La question pour Renault comme pour toute grande entreprise n’est pas « faut-il faire sa transformation digitale ? », mais « comment la mettre en place ? ». Evidemment le recrutement de data scientists et de spécialistes du big data est une priorité pour Renault, mais pour réussir une transformation digitale ces compétences ne suffisent pas et Renault a pris conscience que les façons de travailler doivent changer et que le rôle des leaders est clé pour encourager la collaboration et la transversalité dans un système qui est traditionnellement vertical et hiérarchisé. L’enjeu est de faire vivre concrètement aux collaborateurs des expériences structurantes comme le partage, le peer-to-peer, le crowd-sourcing et l’open innovation. Des concepts abstraits qui sont pourtant la quintessence du nouveau monde digital.
L’importance du « soft »
L’importance du ‘soft’ – qui est souvent délaissé dans des organisations parfois trop rationnelles – est désormais de plus en plus reconnue et le patron de General Electrics Jack Welch avait donc raison quand il reconnaissait que «the soft stuff is the hard stuff» : produire un outil, définir un process n’est finalement pas si difficile; par contre donner envie c’est autre chose…ça ne se décrète pas.
Il s’agit là d’un changement profond des modes de leadership, un lâcher-prise de la part des dirigeants qui ont compris que l’innovation va de pair avec une certaine prise de risque. La transformation digitale commence dans la tête des patrons. Pour faire face aux nouveaux défis et assurer l’agilité, ils comprennent qu’ils doivent faire confiance aux équipes, favoriser et accélérer les échanges transversaux et la co-création de nouvelles solutions.
Mais il ne suffit pas de demander aux équipes de sortir de leurs silos ou d’être plus créatifs. Très peu de personnes ont naturellement envie de sortir de leur zone de confort, le changement fait peur et c’est tout à fait humain. La transformation digitale est tout d’abord un défi humain. Ce changement doit être accompagné, et c’est la nouvelle mission du manager : il est tout d’abord agent de changement, c’est lui qui encourage ses équipes à bouger et les fait ainsi grandir et accessoirement atteindre des résultats business durables.
L’expérience chez Renault
Renault a donc décidé de lancer une série d’initiatives pour passer des paroles aux actes, pour créer les conditions pour que ce changement puisse réellement avoir lieu. C’est l’expérience qu’ont vécu au cours des derniers mois un nombre de plus en plus important de collaborateurs au sein de Renault. Plutôt que d’assister à de traditionnelles présentations à base de power-point plusieurs centaines de collaborateurs appartenant à plusieurs régions géographiques et différentes fonctions ont participé à des sessions très interactives et véritablement inattendues : des expériences très physiques et suffisamment ludiques pour diluer les anxiétés et les peurs mais avec l’objectif très sérieux de créer de la valeur concrète pour le business. Deux sessions notamment – la marketplace et le co-building – ont permis de faire vivre l’expérience collaborative du partage de bonnes pratiques et de la co-construction de solutions innovantes autour de problématiques business très concrètes. Ces expériences requièrent une préparation méticuleuse pour identifier les enjeux et formaliser en bonne et due forme les bonnes pratiques et les briefs. Mais le succès de ces initiatives repose surtout sur la capacité des patrons à jouer leur nouvelle partition de leader inspirant, de facilitateur dont la mission première est de motiver, de donner envie et d’encourager les échanges entre les équipes, le travail en réseau au-delà des silos.
Un cheminement long et complexe
Ce processus est un cheminement long et complexe dont le succès dépendra essentiellement de la volonté des managers et de leur capacité à incarner – à travers leurs comportements – cette transformation des façons de travailler. (Mai 2016)
Html code here! Replace this with any non empty text and that's it.