La déclinaison du plan Juncker sur les territoires

Laurent ZYLBERBERG

Directeur des relations institutionnelles, internationales et européennes – Groupe Caisse des Dépôts

La capacité des institutions financières publiques nationales de jouer un rôle d’interface sur les territoires est un facteur clé de succès du plan.

Sept années après le déclenchement de la crise financière et la récession qui a suivi, l’investissement en Europe reste inférieur de 12 % aux niveaux de 2007 dans la zone euro. Pourtant, si l’on agrège les besoins d’investissement en infrastructures dans les réseaux transeuropéens de transport, d’énergie et de télécommunications, les besoins dans les secteurs de l’eau et des déchets, de la santé, dans l’enseignement ou en production d’électricité, les estimations les plus optimistes prévoient un besoin annuel d’investissement de 650 milliards €. Ce déficit d’investissement entrave le potentiel de croissance de l’Europe sur le long terme.
C’est dans ce contexte que la Commission européenne a lancé en 2014 un Plan d’investissement pour l’Europe (PIE) avec pour élément central le Fonds européen pour les investissements stratégiques (EFSI), un programme soutenu par une garantie de 21 milliards d’euros (Md€) qui doit permettre de mobiliser jusqu’à 315 Md€ d’investissements supplémentaires en Europe.
18 mois après, notamment grâce à l’implication des institutions financières publiques (dont le Groupe Caisse des Dépôts avec sa filiale Bpifrance), l’initiative bienvenue est devenue une réalité tangible. Avec la mise en place opérationnelle de son comité d’investissement, environ 100 Md€ d’investissements « additionnels » ont été suscités par le PIE.
Alors que nous approchons du “mid-term” du Plan, 15 projets d’infrastructure (2,2 Md€ permettant de mobiliser 8,2 Md€ d’investissement et créer 31 900 emplois) et vingt accords de financement des PME (518 M€ permettant de mobiliser 6,3 Md€ d’investissement bénéficiant à plus de 38 000 PME et start-up) ont déjà été signés en France.
La forte mobilisation des ressources du Groupe CDC n’est sans doute pas étrangère à ces premiers résultats encourageants qui font que les deux tiers des projets financés en France au titre du Plan Juncker l’ont été avec le soutien de notre institution. En effet, dès l’annonce du lancement du PIE, le Groupe Caisse des Dépôts s’est fortement mobilisé en interne pour son déploiement sur ­l’ensemble du territoire s’opère de manière optimale. Concrètement, notre Groupe, qui a noué un partenariat avec la BEI en 2013, joue un rôle d’interface opérationnelle principale mais non exclusive de la BEI.
CDC, interface opérationnelle
Notre capacité contributive potentielle de 8 Md€ sur la période 2015-2017, sous forme de prêts (en grande majorité), d’interventions en fonds propres ou de garanties, au service de projets individuels et de plateformes de projets thématiques (nationales et/ou européennes), nous situe parmi les plus importants contributeurs.
Le Groupe CDC porte une vingtaine d’opérations relevant de la « dynamique Juncker », qui ont été signées ou sont en cours d’instruction. Il a été à l’origine de l’une des premières opérations signées (Programme « InnovFin » permettant à Bpifrance de participer au financement d’entreprises innovantes en France).
Le Groupe agit comme interface opérationnelle principale pour le financement de projets sur le territoire français et pour le déploiement de l’assistance technique. Il entend être aussi l’un des points d’entrée en France de la Plateforme européenne de Conseil en Investissement (EIAH).
Avec ses partenaires de l’Association européenne des investisseurs de long terme (ELTI) et les contributeurs de l’Intergroupe sur ­l’investissement de long terme et la réindustrialisation du Parlement européen, la CDC souhaite que tous les leviers soient mis à profit pour optimiser l’efficacité du Plan. En ce sens, les plateformes d’investissement, instruments capables de remédier aux carences du marché des projets de petite à moyenne taille susceptibles de créer un effet de levier significatif, constituent une opportunité dont la Commission européenne doit favoriser la mise en œuvre.
Par ailleurs, les investisseurs de long terme ont besoin d’un cadre réglementaire, prudentiel et comptable propice qui leur permette de jouer pleinement leur rôle d’acteurs contra-cycliques favorisant la stabilité financière de nos économies. Initiative ambitieuse de la Commission européenne conjointement mise en place par les États membres et leurs institutions financières publiques, le PIE doit tendre vers l’efficacité optimale car l’enjeu est de taille : retrouver le chemin de la croissance au bénéfice de l’emploi dans l’UE.

1) Rapport Institut Jacques Delors-Notre Europe (février 2016).
2) G. Inderst, Private Infrastructure Finance and Investment in Europe, EIB Working Papers, Feb. 2013.

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