L’économie circulaire participe des ambitions européennes

Par Jean Hornain – Directeur général de CITEO

CITEO est une entreprise qui a pour mission de réduire l’impact environnemental des emballages et papiers des entreprises de la grande consommation et de la distribution. Elle leur propose des solutions autour du réemploi et du recyclage.

L’industrie et l’environnement constituent deux politiques clés de l’Union européenne, dont les objectifs et modalités de mise en œuvre sont souvent mis en opposition.

Pour autant, un point de conciliation existe. L’économie circulaire permet en effet de contribuer à l’économie de ressources et de répondre aux enjeux de compétitivité, d’investissement et d’approvisionnement en matières premières, auxquels les acteurs industriels sont confrontés. Elle offre par ailleurs une réflexion plus stratégique sur la conception et la mise en œuvre de politiques clés.

En tant qu’acteur de l’économie circulaire en France dans le secteur des emballages ménagers et des papiers, avec plus de 30 ans d’expertise, mais également engagé au niveau européen et international, Citeo apporte un éclairage, nourri par ses activités de réduction, réemploi et recyclage des emballages et papiers, sur la manière concrète et pragmatique d’aborder ces enjeux.

Les politiques environnementale et industrielle constituent deux politiques clés de l’UE

La politique environnementale de l’Union est incarnée depuis 2019 par le Pacte Vert pour l’Europe, qui a donné lieu à différents textes législatifs, et qui a été, au fil des années, de plus en plus prise en compte par les autres politiques européennes (industrie, énergie, commerce, taxonomie). Il a fixé deux objectifs principaux : que l’UE soit le premier continent climatiquement neutre d’ici 2050 et que les émissions nettes de GES soient réduites de 55% d’ici 2030 par rapport à leur niveau de 1990.

La politique industrielle, quant à elle, vise à renforcer la compétitivité de l’Union et à promouvoir une économie plus durable, plus résiliente, numérisée et créatrice d’emplois. Elle s’entend désormais comme « l’autonomie stratégique », c’est-à-dire de la volonté de réduire la dépendance de l’UE vis-à-vis des pays tiers, s’agissant notamment des matières premières, des technologies critiques et des infrastructures.

L’économie circulaire, point de conciliation entre les enjeux de politique industrielle et de politique environnementale

Une opposition apparait souvent entre ces deux politiques, alors qu’elles sont complémentaires. Pour autant, un point de conciliation existe avec l’économie circulaire.

Selon les approches développées par la fondation Ellen Mac Arthur, l’OCDE, l’Ademe ou encore l’institut national de l’économie circulaire, l’économie circulaire est un modèle économique axé sur la durabilité produite et la réduction des déchets. Contrairement à l’économie linéaire traditionnelle, qui suit le schéma « extraire, produire, utiliser et jeter », l’économie circulaire vise à minimiser l’utilisation des ressources et à maximiser la réutilisation, la réparation, le recyclage des produits et des matériaux mis sur le marché. Elle encourage pour cela la conception de produits durables, la prolongation de leur durée de vie, et la création de boucles fermées où les déchets sont transformés en nouvelles ressources. L’objectif est de créer un système plus efficace et respectueux de l’environnement, tout en permettant favorisant l’innovation et la croissance économique.

L’économie circulaire offre donc un nouveau modèle économique pour moins de matières premières, moins de déchets et moins d’émissions, prenant en compte la vision globale de l’économie. Face aux enjeux liés à l’épuisement des ressources naturelles et aux impacts de leur exploitation sur l’environnement, l’économie circulaire permet par ailleurs de découpler la croissance économique et la consommation des matières, en améliorant le taux de productivité des ressources.

Elle est une condition préalable à l’atteinte de la neutralité climatique de l’Union d’ici 2050, ce qui a été confirmé par le plan d’action en faveur de l’économie circulaire de 2020 et elle participe au renforcement de l’autonomie stratégique de l’UE, en permettant une gestion durable et efficace des ressources, un approvisionnement en matières premières au plus près des besoins, des chaines de valeur plus soutenables, une implication collective de toutes les parties prenantes, ainsi que le soutien au développement du tissu économique local et à l’emploi.

L’UE a développé son cadre législatif pour répondre à l’ambition européenne d’une économie circulaire

Plusieurs textes ont permis de renforcer le cadre de l’économie circulaire à chaque étape de la chaîne de valeur : règlement sur les emballages et les déchets d’emballages (PPWR) pour des règles harmonisées sur la réduction, le réemploi, la recyclabilité, l’intégration de contenu recyclé, la consigne pour recyclage et les marquages ; règlement sur l’écoconception pour faciliter le réemploi, la réparation et le recyclage des produits et une plus grande transparence de l’information par la mise en place du passeport numérique ; directive sur le droit à la réparation ; règlement sur le transfert de déchets vers les pays non-membres de l’OCDE ; renforcement des droits et responsabilisation des consommateurs avec la directive sur les pratiques commerciales déloyales et le règlement taxonomie pour orienter les investissements vers des projets durables.

D’autres textes sont encore en négociations dont la directive sur les allégations environnementales et la directive-cadre relative aux déchets.

L’UE devra cependant intensifier la mise en œuvre de la stratégie 3R pour atteindre les objectifs de circularité

Poursuivre les efforts de réduction à chaque étape de la chaîne de valeur

Selon Eurostat, sans action, l’Union européenne pourrait connaître une augmentation de 19% des déchets d’emballages et de 46% des déchets d’emballages plastiques d’ici 2030.

Une première étape a été franchie avec la directive sur les plastiques à usage unique (SUP) en 2019, qui interdit certains produits en plastique à usage unique et encourage les États membres à réduire la consommation de certains articles.

Le PPWR vient fixer des mesures de réduction et interdire certains formats d’emballage. Les Etats membres sont tenus de réduire les déchets d’emballages par habitant par rapport à 2018 (de 5% d’ici 2030, de 10% d’ici 2035 et de 15% d’ici 2040).

Il est important, dans ce contexte, d’accompagner les marques en développant des lignes directrices claires, par type d’emballage et par secteur. Répondant à ce besoin, Citeo a introduit la méthodologie « LESS », qui accompagne les entreprises dans la mise en œuvre de mesures de réduction et a mis à disposition des consommateurs le dispositif « SEE » leur permettant de remonter à Citeo et aux entreprises les emballages qu’ils jugent excessifs. De manière générale, le système d’écomodulation pratiqué par Citeo permet d’inciter à la réduction.

Définir de manière harmonisée des objectifs de réemploi

Avec le PPWR, l’Union européenne pose une première étape pour définir des objectifs harmonisés de réemploi pour différents secteurs.

Le réemploi constitue un moyen efficace et pertinent de réduire l’impact environnemental des emballages. Citeo a mené une étude récente avec Carbone 4 qui démontre qu’il contribue significativement à décarboner les emballages, entre 15% et 40% de la réduction des émissions de CO2 nécessaire d’ici 2050 pourrait ainsi être atteinte grâce au réemploi.

La France s’est engagée à ce que 10% de tous les emballages soient réemployés d’ici 2027. Mais pour que cette solution s’impose, Citeo estime qu’une réponse coordonnée au niveau européen est nécessaire pour construire un véritable écosystème et engager de manière harmonisée les entreprises européennes dans un changement de fond et ainsi permettre de développer des systèmes de réemploi à l’échelle :

– Préfigurer des dispositifs efficients permettant au réemploi d’être compétitif par rapport à l’usage unique ;

– Mettre en œuvre des systèmes efficaces de consigne ;

– Standardiser les emballages pour créer un modèle performant d’un point de vue économique et environnemental ;

– Établir un système de financement mutuel en créant un mécanisme de financement similaire à celui existant pour les emballages à usage unique à travers l’extension de la responsabilité élargie des producteurs ;

– Sensibiliser les consommateurs par un marquage à l’échelle européenne.

Poursuivre l’intégration de matières premières secondaires

L’intégration de matières premières secondaires dans l’emballage contribue à la circularité du matériau et à la réduction de son impact sur l’environnement. La directive SUP a été pionnière en matière d’obligation d’intégration du contenu recyclé en définissant des objectifs pour les bouteilles PET en 2025 (25%) et les bouteilles de boissons en 2030 (30%). Le PPWR va également dans ce sens en définissant des obligations de contenu recyclé pour la partie plastique des emballages.

Pour autant, des objectifs obligatoires en matière de contenu recyclé englobant tous types de secteurs d’activité, publics et privés, sont essentiels afin de favoriser des conditions de concurrence équitables et encourager la réduction des matières vierges.

Assurer un recyclage de qualité

Selon Eurostat, le taux de recyclage des déchets d’emballages s’est établi à 64% en 2021, soit le même niveau que celui que de 2010, ce dû notamment aux disparités importantes dans les performances de recyclage entre les États membres. Une plus grande harmonisation réglementaire apparaît donc nécessaire.

Le PPWR aborde la question de la recyclabilité en exigeant que tous les emballages soient conçus pour être recyclés au 1er janvier 2030 et recyclés à l’échelle d’ici 2035, suivant l’atteinte d’une quantité annuelle définie de matière recyclée sur le territoire européen. La proposition fixe des niveaux de recyclabilité, interdisant la mise sur le marché de l’UE d’emballages ayant moins de 70% de recyclabilité à partir de 2030. Ce taux est ensuite réhaussé à 80% en 2038. Définir la recyclabilité des emballages selon les classes de performance, combinée à l’écomodulation, améliorera leur circularité.

Citeo vise une solution de recyclage de 100% des emballages plastiques. Pour ce faire, elle a mis en place le tri des plastiques ne disposant pas jusqu’alors de solutions (PS, barquettes PET, PET opaque et coloré) pour en organiser le tri et le recyclage, avec des nouvelles solutions de recyclage.

De nouvelles technologies de recyclage chimique ou mécanique sont par ailleurs pertinentes pour améliorer les performances de recyclage des déchets ménagers issus des emballages plastiques.

Harmoniser les exigences minimales de collecte en Europe

Citeo plaide pour introduire des exigences minimales harmonisées pour décider du modèle de collecte sélective à mettre en œuvre, afin d’améliorer le réemploi et le recyclage. Il est également essentiel de permettre la collecte partout et tout le temps afin d’assurer une continuité du geste de tri et améliorer les performances de la collecte. Ainsi, Citeo travaille depuis 2012 à étendre les consignes de tri.

Favoriser la responsabilité des parties prenantes dans l’utilisation du plastique

Conformément au principe de proximité et pour faciliter l’intégration des matières premières secondaires, il est essentiel de conserver la ressource en déchets sur le territoire de l’UE. Dans cette perspective, la révision du règlement sur le transport des déchets garantira que l’UE assumera une plus grande responsabilité à l’égard de ses déchets. Les règles faciliteront l’utilisation des déchets comme ressource en interdisant l’exportation de déchets plastiques de l’UE vers des pays non-membres de l’OCDE.

Il s’agit d’un progrès significatif qui pourrait être renforcé par des mesures complémentaires, notamment l’extension du champ d’application du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières à d’autres matériaux tels que les polymères. Cela participera à rétablir les conditions d’une concurrence loyale, à réduire les fuites de carbone et à soutenir les prix des matières premières secondaires.

Article-CITEO-1

Derniers articles

Articles liés

Leave a reply

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici