Anne MACEY
Déléguée générale, Confrontations Europe
Faut-il taxer les GAFA? Le sujet était à l’ordre du jour du dernier conseil des ministres des finances de l’UE, et Anne MACEY fait le point dans la chronique Europe hebdomadaire sur Radio RCF, tous les vendredi à 7h30 (émission du 21 septembre).
Les GAFA, ce sont les Google, Apple, Facebook, Amazon, ces grandes entreprises du numérique américaines. Ce sont les capitalisations boursières les plus importantes au monde. Le problème, c’est que nos impôts conçus il y a un siècle ne sont plus adaptés à l’économie numérique, ce qui permet aux GAFA d’échapper largement à l’impôt. Nul n’est besoin aujourd’hui d’avoir son siège social ou un « établissement permanent » dans un pays pour y avoir une « présence numérique significative » !
On se retrouve avec des acteurs européens taxés, alors que des acteurs internationaux qui viennent les concurrencer ne le sont pas…. Ce n’est pas acceptable. L’impôt sert à financer des biens communs (école, santé, infrastructures comme l’internet haut débit…): il est juste que tous y contribuent. Au niveau international, des travaux sont engagés pour déterminer comment taxer la valeur créée là où elle est produite. Comme les Américains coopèrent, vous vous en doutez, assez peu, c’est au niveau européen qu’un cadre de régulation juste pourra être développé, mais cela prendra du temps, d’autant qu’en matière fiscale les décisions requièrent l’unanimité.
Alors, la Commission européenne a proposé une solution de court terme: une taxe GAFA. En réalité, elle ne vise pas que les GAFA, ce serait discriminatoire. Elle concerne les grands acteurs du numérique avec un chiffre d’affaires mondial de plus de 750M€ et un chiffre d’affaires européen de plus de 50M€, histoire d’éviter de toucher les PME en plein développement. Cette taxe de 3% sur le chiffre d’affaires réalisé sur le territoire de l’UE prévoit de ramener 5Mds € par an. Ce n’est pas négligeable dans un contexte de Brexit.
Mais elle ne fait pas l’unanimité à ce stade. L’Irlande n’en veut pas, son business model repose sur l’attractivité fiscale, l’Allemagne aussi n’est pas très allante, elle a plus à perdre en matière de commerce international avec les Etats-Unis. Mais la France et ses partenaires ont bon espoir d’obtenir une position commune avant la fin de l’année, à la veille des élections européennes de mai.