Les jeunes et l’Europe : l’engagement pour contrer le désintérêt

Lorène WEBER

Chargée de mission Jeunesse à Confrontations Europe

73 % des jeunes âgés de 18 à 35 ans n’ont pas voté aux élections européennes de mai 2014… Face à ce constat, des associations et organisations de la société civile ont tenté de comprendre le ressenti des jeunes, de les (ré) intéresser à l’Europe, et les inciter à voter le 26 mai prochain.

Seuls 25 % des jeunes interrogés se sentent citoyens européens, selon une enquête intitulée « Les jeunes Français et l’Europe de demain » menée par l’AFEV (Association de la fondation étudiante pour la ville). Un taux qui contraste fortement avec les résultats de l’Eurobaromètre de juin 2018 dans lequel 70 % des sondés affirmaient se sentir citoyens européens. L’AFEV a tenté d’identifier ce que signifient à la fois l’engagement et l’Europe pour les jeunes.
Pour les trois quarts des jeunes interrogés par l’AFEV, « être citoyen européen » signifie pouvoir travailler ou étudier dans n’importe quel pays de l’UE. Plus d’un tiers d’entre eux associent l’UE à la diversité, la paix et la mobilité (82 % des interrogés ont d’ailleurs déjà voyagé dans un autre pays de l’UE, et 14 % ont effectué un Erasmus). Seuls 24 % d’entre eux lient la citoyenneté européenne au droit de voter ou d’être élu aux élections locales dans l’État membre où ils résident, et 27 % lient l’Europe à la démocratie.

Renforcer le sentiment d’appartenance à l’Europe
Il semble ainsi qu’une majorité de jeunes a conscience des avantages offerts par l’Europe en termes de mobilité, que ce soit en termes d’opportunités professionnelles, d’études ou de voyage, mais peu associent l’UE à un cadre politique, démocratique ou institutionnel dans lequel ils s’identifient.
En termes de mobilisation politique, on s’éloigne des formes « traditionnelles » d’engagement. Moins de 10 % des jeunes interrogés associent la participation à la vie publique dans l’UE à l’adhésion à un parti politique ou un syndicat. En revanche, respectivement 45 et 43 % des jeunes interrogés l’associent au fait d’effectuer un service civique en Europe ou d’adhérer à une association ou une ONG. Une majorité des jeunes interrogés connaît d’ailleurs l’existence du service civique, et 15 % en ont déjà effectué un, mais une minorité connaît les possibilités de service civique à l’échelle européenne – une meilleure connaissance de ces possibilités pour¬rait être susceptible de renforcer le sentiment d’appartenance européenne auprès des jeunes. L’association Unis-Cité, à l’origine du service civique en France, a d’ailleurs participé à l’enquête de l’AFEV ainsi qu’au Forum Européen des Jeunes Engagés.
Pour 55 % des jeunes interrogés par l’AFEV, participer à la vie publique dans l’UE signifie aller voter aux élections européennes. Comment alors ex¬pliquer l’énorme taux d’abstention des jeunes aux élections de 2014 ? Peut-être parce que si une majorité de jeunes associe le vote à la participation à la vie publique, cette dernière les désintéresse. Les conclusions du rapport du European Youth Event (EYE), événement ayant rassemblé 9 000 participants à Strasbourg les 1er et 2 juin 2018, vont dans le même sens : les jeunes ont le sentiment que leur vote n’a pas d’importance.
Les participants au EYE, âgés de 16 à 30 ans, avaient alors émis plusieurs recommandations à même de renforcer le sentiment de citoyenneté européenne auprès des jeunes. En termes d’implication dans le processus politique, ils proposent d’encourager les jeunes à se présenter aux élections, notamment en poussant les groupes politiques à instaurer un quota de candidats plus jeunes. Pour accroître leur participation au débat public, l’idée qui a émergé serait la tenue d’une séance annuelle de questions-réponses entre les dirigeants de l’UE et les jeunes (le débat entre les Spitzenkandidaten du 29 avril semble aller dans ce sens, puisqu’il se concentrera sur des questions de jeunesse et se déroulera face à un public jeune). Enfin, autre proposition : il s’agirait de renforcer l’éducation politique dans les écoles et d’utiliser les nouvelles technologies et les médias sociaux, plus pertinents que les médias traditionnels pour atteindre les jeunes. De fait, pour un quart des jeunes interrogés par l’AFEV, seul internet est le média qui leur permet d’obtenir des informations sur l’Europe et son fonctionnement.
À l’approche des élections, des associations de jeunesse ont pris des initiatives pour mobiliser jeunes et associations pour l’Europe. Animafac, le réseau des associations étudiantes en France, a ainsi organisé le 16 mars dernier le Festival des jeunes engagés en Europe, qui a réuni 2 000 jeunes et 70 associations à Paris.
Les Jeunes Européens France ont lancé la campagne « Mon Vote mon Europe », et proposent des débats entre eurodéputés, des actions de rue et des campagnes sur les réseaux sociaux. Ils ont également publié un manifeste déclinant 20 priorités pour l’Europe.
L’engagement et l’intérêt des jeunes pour l’Europe n’ont pas disparu, et une partie de la société civile se mobilise pour impliquer les jeunes. L’implication des pouvoirs publics pour soutenir ces initiatives, s’adresser à la jeunesse et les inciter à participer au débat public, quant à elle, reste toujours minime…

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