Le couple franco-allemand au pied du mur

Marcel GRIGNARD

Président de Confrontations Europe

Après le Brexit, l’Allemagne et la France doivent redéfinir leur rôle au sein de l’Union européenne. Le 17 mai dernier, lors de son assemblée générale, Confrontations Europe avait déjà organisé un débat autour du couple franco-allemand. À cette occasion, l’ambassadeur d’Allemagne, Nikolaus Meyer-Landrut, et le président de BNP Paribas, Jean Lemierre, ont réaffirmé l’importance de ce double leadership dans le contexte troublé que traverse l’Europe.

À 27, l’équilibre des forces en UE est remis en cause. Le départ des Britanniques va accroître de fait le poids du couple franco-allemand alors que le projet européen doit être redynamisé, voire redéfini. Nikolaus Meyer-Landrut, ambassadeur de la République fédérale ­d’Allemagne et Jean Lemierre, président de BNP Paribas, sont revenus, au cours du débat qui a conclu l’assemblée générale de Confrontations Europe de mai dernier, sur cet enjeu alors même que les États membres peinent à trouver un terrain d’entente pour traiter les problèmes auxquels les Européens sont confrontés.
Les deux intervenants ont mis l’accent sur les risques majeurs auxquels l’Europe doit faire face : la situation au Moyen-Orient, le terrorisme, les réfugiés. « Nos histoires politiques, économiques sont différentes, a insisté Nikolaus Meyer-Landrut, mais nos différences font notre force commune. Nos sociétés doivent faire face à deux défis majeurs : en Allemagne, l’arrivée massive des réfugiés ; en France, la question sécuritaire liée aux actes terroristes. » Pour avancer ensemble, il convient de mieux se connaître, mieux se comprendre. Nikolaus Meyer-Landrut a déploré que « la connaissance profonde de notre culture, de nos histoires, de nos langues régressent. Car on ne peut pas se comprendre en anglais. On peut se parler en anglais ». Les termes « réfugiés » ou « migrants » ne recouvrent pas les mêmes problématiques…
Ne pas aggraver les fractures
Le couple franco-allemand est au centre du processus européen, comme l’a aussi rappelé Jean Lemierre, président de BNP Paribas. « Mais ce dont l’Europe a besoin aujourd’hui, c’est de confiance en elle-même », a-t-il ajouté. Les objectifs généraux sont partagés par les Allemands et les Français, ce qui fait débat, ce sont les solutions à mettre en œuvre. Or, la France et l’Allemagne sont sur des trajectoires économiques différentes et, les deux pays, à l’instar des autres membres de l’Union européenne, ont des désaccords sur le policy mix (l’équilibre entre les composantes des politiques macroéconomiques). Jean Lemierre a ajouté : « Pour favoriser l’investissement dont nous avons besoin, en particulier l’investissement long, on a besoin d’un couple franco-allemand qui fonctionne très bien. Il faut discuter d’un policy mix européen ».
L’initiative commune du président de la Deutsche Bundesbank, Jens Weidmann et de François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France, pour une gouvernance dynamique de la zone euro est à saluer. Cependant, elle ne dit rien de l’articulation entre Union européenne et la zone euro qui est pourtant vitale si nous ne voulons pas aggraver dans le même temps les fractures qui minent la solidarité européenne.
La suite du débat a confirmé le besoin de mieux se comprendre quant aux différences de points de vue sur l’économie, de mieux connaître les réalités : l’Allemagne a dédié un budget de 18 milliards d’euros à l’accueil et à l’intégration des migrants car elle considère cette arrivée comme un investissement pour l’avenir. De grandes coopérations sont à l’œuvre aussi dans le domaine du numérique. Dans le domaine de l’énergie où l’Union européenne laisse chaque État membre choisir ses sources de production d’énergie, la France et l’Allemagne ont adopté des transitions énergétiques très différentes et, à l’intérieur de chacun de nos pays, le débat est compliqué. Le principal souci, dans ce domaine comme dans d’autres, vient du fait que les États membres se soucient peu des conséquences qu’auront leurs décisions sur leurs voisins.
« Le peuple allemand ne cherche pas un leadership allemand, a réaffirmé Nikolaus Meyer-Landrut. Nous avons vu, dans l’histoire de l’Europe, que ce genre de choses tourne mal. Un partenaire français, confiant en lui-même, est pour nous très important. Un leadership unique ne fonctionne pas ». La décision des citoyens britanniques de quitter l’Union renforce la nécessité de la refonder si elle ne veut pas sombrer.
2017 est une année d’élections en Allemagne et en France, période peu propice aux projections dépassant les représentations et les intérêts de court terme. Il n’y a cependant pas de temps à perdre pour reconstruire l’avenir européen.

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