Propos recueillis par Lorène Weber
chargée de mission au bureau de Bruxelles de Confrontations Europe
Le Parlement européen, qui vient d’être élu, compte 61 % de nouveaux députés.
Damian Boeselager, élu eurodéputé en Allemagne en fait partie. Âgé de 31 ans, il est aussi issu d’une nouvelle formation : le parti transnational Volt Europa, qu’il a cofondé en 2017. Damian Boeselager, qui siégera au sein du groupe des Verts au Parlement européen, a accepté de répondre aux questions de Confrontations Europe en amont de la première session du nouveau Parlement
Quelle est votre analyse des élections européennes ?
Damian Boeselager : D’abord, Volt Europa a un siège, ce qui me rend évidemment très heureux. Ensuite, la participation en hausse à ces élections est une très bonne nouvelle, parce que cela prouve une hausse de l’intérêt général pour l’Union européenne, une meilleure appréhension de ce qu’il se passe en Europe, et une prise de conscience que nous ne devons pas céder le pas aux populistes de droite. Je citerais également la progression des partis verts par rapport aux partis plus traditionnels, comme cela a été le cas en Allemagne notamment.
Quelles seront vos priorités en tant qu’eurodéputé nouvellement élu ? Quelles commissions parlementaires ou intergroupes comptez-vous rejoindre ?
D.B. : Cela sera probablement confirmé dans les prochaines semaines, mais je souhaite vivement travailler au sein de la commission des affaires constitutionnelles (AFCO). Un des points très importants du programme de Volt, que nous avons défendu à travers le continent, est le besoin de réformer l’UE, et d’aller vers un fonctionnement de l’UE plus démocratique. Renforcer le statut des partis européens est pour moi l’une des priorités, et cela passe par une réforme électorale de l’UE, au vu des divergences criantes qui existent entre les différents États membres. En Italie, par exemple, il faut rassembler 150 000 signatures pour pouvoir se présenter aux élections européennes. En France, il faut environ un million d’euros, parce que les partis doivent imprimer eux-mêmes leurs bulletins de vote : s’ils ne sont pas en mesure de le faire, ils sont tout simplement invisibles. Ce sont des barrières à la démocratie, et c’est pourquoi nous avons cruellement besoin d’harmonisation. Ce sera l’une de mes priorités au sein d’AFCO.
J’œuvrerai aussi pour que soient mis en place des changements en faveur d’une réelle démocratie parlementaire européenne, ce qui nécessite des réformes des traités plus conséquentes.
Les autres commissions parlementaires dont je souhaite faire partie sont celles reflétant le programme de Volt Europa, c’est-à-dire la commission de l’industrie, de la recherche et de l’énergie (ITRE), qui travaille sur l’avenir de la politique industrielle de l’Europe, et la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures (LIBE), qui travaille sur la politique européenne d’asile et de migrations.
En tant qu’élu d’un parti transnational, pensez-vous que le Parlement européen est mûr pour adopter une dimension plus transnationale ? Vous avez signé le manifeste de l’Union des fédéralistes européens en amont des élections, cela s’inscrit-il dans une stratégie transnationale ? Ferez-vous campagne pour des listes transnationales aux élections européennes de 2024 ?
D.B. : En tant que parti transnational, nous avons évidemment une stratégie transnationale. Nous avons créé Volt car nous pensons que nous avons besoin de partis européens et de politiques transnationales : pour nous, le problème de l’UE est qu’elle est encore majoritairement conduite par des partis et des politiques nationaux, y compris au Parlement européen, et bien sûr au Conseil. De nombreux intérêts nationaux différents sont défendus dans les institutions européennes, et il y a un manque de réponses européennes à un certain nombre d’enjeux.
De plus, notre vision est qu’il faudrait qu’un électeur ait un vote pour un eurodéputé de sa région ou pays, et un vote pour un parti européen. Nous militerons pour cela. Créer une liste transnationale avec les sièges laissés vacants par les eurodéputés britanniques après le Brexit, au lieu de les allouer à d’autres États membres, serait une première étape pour créer une sphère publique et un électorat plus européens. Mais c’est d’une réforme profonde dont nous avons besoin, et cela doit apparaître dans les traités et la loi électorale.
Ensuite, à travers les différents groupes, il y a des gens désireux d’améliorer le fonctionnement de l’Union, bien qu’ils aient des priorités différentes sur la manière dont cela devrait être fait. Je pense qu’il pourrait être très intéressant de discuter avec les différents groupes et les différents membres de ces groupes, pour trouver un consensus pour aller plus loin que l’Union actuelle. Sinon nous courrons le risque de voir l’UE se désintégrer davantage. Il faut oser aller vers plus de démocratie pour que les citoyens puissent voir comment la démocratie européenne fonctionne et est responsable devant leurs votes et leurs intérêts. C’est quelque chose que nous devons faire maintenant : cela est peut-être difficile, mais nous en avons assurément besoin.
Notes de bas de page