Sophie In ‘t Veld (Renew, NL) rapporteuse du texte (c) Parlement européen
Le 29 février 2024, le Parlement européen a largement approuvé le rapport de la Commission européenne sur l’État de droit en Europe, mettant en lumière des préoccupations concernant la situation de l’État de droit au sein de certains États membres.
Le rapport, soumis au Parlement européen le 29 février, a obtenu un large soutien avec 374 votes favorables, provenant principalement des membres du PPE, de Renew et de S&D, tandis que 113 voix défavorables, majoritairement émises par les partis ID et ECR.
Durant la conférence de presse précédant le vote, la rapporteuse Sophie In ‘t Veld (Renew, NL) a souligné que « le rapport de la Commission sur l’État de droit doit traiter chaque État membre de manière égale et objective. Les pressions politiques des gouvernements ne doivent pas avoir le droit de l’influencer, car les Européens ont le droit de connaître l’état de l’État de droit dans leur pays, où qu’ils résident. »
L’objectif de ce document d’analyse est d’approfondir la compréhension de la situation de l’État de droit au sein de l’Union européenne, en mettant particulièrement l’accent sur un outil spécifique : le rapport annuel sur l’État de droit de la Commission européenne. Instauré en 2019 par une communication de la Commission et publié pour la première fois en septembre 2020, ce rapport représente l’une des méthodes les plus récentes d’évaluation de l’État de droit.
Sylvie Guillaume (S&D, FR) a souligné lors de la session plénière que 65% des recommandations du rapport de 2022 ont été prises en compte, démontrant ainsi l’utilité tangible de cette étude.
La Commission européenne, dans le cadre de cette analyse, se base à la fois sur des informations publiques et sur des données spécifiquement collectées pour fournir aux parties prenantes un éclairage sur cet outil complexe. Contrairement aux audits, les analyses de la Commission ont une visée descriptive et informative. Sylvie Guillaume a exprimé sa volonté de faire évoluer le rapport vers « quelque chose d’assez simple, même si c’est compliqué à mettre en place, c’est-à-dire, des recommandations contraignantes », une idée également soutenue par Sophie In’T Veld.
L’État de droit, en tant que principe universel de gouvernance et valeur fondatrice de l’Union européenne, est inscrit dans les traités et interprété de manière plus concrète par la jurisprudence de la Cour de justice de l’UE. De plus, le Parlement européen et le Conseil ont convenu d’une définition de ce principe en décembre 2020 dans le règlement relatif à un régime général de conditionnalité pour la protection du budget de l’Union.
Le Rapport sur l’État de droit, bien qu’il ne dispose d’aucune force exécutoire, se présente comme un outil préventif offrant l’évaluation, par la Commission européenne, des évolutions importantes de l’État de droit au cours de l’année écoulée dans les 27 États membres. Toutefois, il ne propose pas une vue exhaustive des cas et mesures concernant l’État de droit, ni de leurs interconnexions.
Le Rapport se structure autour de quatre domaines thématiques, évaluant les systèmes judiciaires nationaux, les cadres de lutte contre la corruption, le pluralisme et la liberté des médias, ainsi que d’autres questions institutionnelles liées à l’équilibre des pouvoirs. Il s’appuie sur un dialogue avec les États membres, les parties prenantes, ainsi que sur les contributions d’autres organismes de l’Union européenne et d’organisations internationales.
La Commission procède à une évaluation qualitative des évolutions de l’État de droit en se basant sur le droit de l’UE et d’autres normes européennes, classant les problèmes selon leur nature et leur gravité. Depuis 2022, le Rapport comprend des recommandations adressées à chaque État membre, avec un suivi assuré par la Commission pour évaluer les progrès réalisés dans leur mise en œuvre. En 2023, il a été observé que 11 % des recommandations étaient intégralement mises en œuvre, 55 % partiellement, et 34 % stagnaient.
La publication du Rapport entraîne diverses initiatives, tant au niveau de l’Union européenne que des États membres, telles que le dialogue annuel du Conseil sur l’État de droit et les dialogues nationaux de la Commission sur l’État de droit dans les États membres.
Le Parlement européen s’inquiète du manque de cohérence entre la communication et les recommandations de la Commission sur l’État de droit, soulignant une absence de correspondance précise entre les préoccupations exprimées et les recommandations par pays. Il appelle à un lien clair entre les préoccupations et les recommandations, notant qu’aucune des recommandations concrètes dans le Rapport 2022 ne concernait des problèmes considérés comme des « sujets de vive préoccupation ». La Commission affirme que chaque chapitre par pays offre une évaluation précise des préoccupations, formant la base des recommandations.
Certaines recommandations impliquent des actions spécifiques, comme l’instauration de règles concrètes pour la Cour suprême en Hongrie ou le renouvellement du Conseil de la magistrature en Espagne. D’autres fournissent des orientations générales, comme l’amélioration de l’intégrité de secteurs spécifiques de l’administration publique en Bulgarie.
Dans le rapport de 2023, les sous-thèmes les plus ciblés par des recommandations incluent en premier lieu le lobbying, relevant du pilier des Cadres de lutte contre la corruption, avec 15 États membres faisant l’objet de recommandations. Ensuite, 10 pays européens sont visés par des recommandations visant à améliorer l’accès à l’information, relevant du pilier du pluralisme et de la liberté des médias. Enfin, 8 États font l’objet de recommandations concernant la nomination de juges de la Cour suprême ou de présidents de tribunaux nationaux, liées au pilier sur les systèmes judiciaires.
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