Nicole ALIX
Chargée de l’Économie Sociale et Solidaire
Extrait de « Théorie de l’entreprise, économie sociale et entreprise sociale :
quelle cohérence entre le droit et la politique économiques dans l’Union européenne ? »
Réflexions sur les évolutions depuis 1990
“Cause the Times They Are A-Changing””
ISTR CONFERENCE SIENA 12th July 2012
De façon plus structurée encore, certains pensent à faire évoluer le droit des sociétés comme aux USA pour (accorder une place claire aux investisseurs. Lindsay M. Baghramyan (1) rappelle que c’est dans un colloque de septembre 2006 « Exploring New legal forms and tax structures for social enterprise organizations » sponsorisé par The Aspen Institute (qui y a consacré des sommes très importantes) qu’a été discutée la question de savoir s’il fallait inventer de nouvelles formes légales ou si l’on pouvait adapter les formes existantes. Dans les modèles » for profit » de sociétés, les directeurs ont en effet le devoir d’agir dans l’intérêt des actionnaires. Cela se traduit trop souvent par une priorité donnée au profit plus qu’à la croissance du capital et les dirigeants doivent s’y plier. C’est pourquoi, après la critique que Milton Friedman a faite de la CSR « corporate social responsability » (NYTimes, 1970), plusieurs Etats se sont décidés, à partir de 1980, à adopter des lois dites des « constituency statutes ». Celles-ci codifient le droit (ou le devoir) que les dirigeants ont de prendre en compte des intérêts autres que ceux de leurs actionnaires.
Celia Taylor (2) éclaire le débat sur l’opportunité de nouveaux statuts juridiques pour les entreprises sociales. Elle décrit les B corporations (B comme “benefit” ou “beneficial”) comme des sociétés qui choisissent de se placer sous un régime de certification les qualifiant comme socialement responsables auprès des consommateurs et des investisseurs. Pour avoir cette certification (donnée par B Lab, une entité qui prélève 1 pour mille du « corporate revenue » et évalue la façon dont les buts sociaux sont respectés), il faut être incorporé dans un Etat qui a promulgué une loi sur les « constituency statute » et stipuler explicitement dans ses statuts que les managers doivent prendre en compte les intérêts des salariés, de la communauté et de l’environnement.
Après l’échec de Ben & Jerry, victime d’une OPA de Unilever, les dispositions statutaires de BCorp sont toutefois parues insuffisantes.