Auteur : Lorène Weber
Chargée de Mission Finance et Jeunes
Bureau de Bruxelles de Confrontations Europe
Chaque jeudi matin, Confrontations Europe intervient sur les ondes d’Euradio pour un édito consacré à l’actualité européenne.
En début de semaine, les ministres de l’Intérieur des pays de l’UE ont échoué à trouver un accord sur la répartition des demandeurs d’asile. Faisons le point avec Lorène Weber, du think tank Confrontations Europe, sur la politique européenne d’asile et de migration.
Euradio : Qu’est-ce qui bloque la réalisation d’une politique commune d’asile et de migration en Europe ?
Ce qui bloque principalement l’Union européenne pour répondre de façon collective, solidaire et efficace à la crise migratoire, c’est le Règlement de Dublin, qui date des années 1990 et qui établit que toute demande d’asile doit être traitée dans le pays d’arrivée du demandeur. Dans un contexte où des milliers de migrants arrivent d’Afrique du nord et du Moyen-Orient, et où la porte d’entrée de l’Europe est donc la Méditerranée, la pression migratoire subie par les pays d’entrée que sont la Grèce, l’Italie, Malte et Chypre devient insupportable. D’autant plus que l’Italie et la Grèce sont déjà confrontées à des difficultés économiques et à un fort taux de chômage, et que Malte et Chypre sont de petits pays n’ayant pas la capacité d’accueillir un nombre élevé de demandeurs d’asile. Et ce ne sont pas seulement les Etats qui souffrent de la situation, mais aussi bien sûr les migrants et demandeurs d’asile eux-mêmes.
Fin septembre, suite à des émeutes et des incendies dans un camp de l’île de Lesbos justement, la Grèce a annoncé vouloir renvoyer 10.000 migrants en Turquie d’ici fin 2020. Rappelons d’ailleurs l’existence de l’accord UE-Turquie qui consiste, entre autres, à renvoyer en Turquie tous les migrants irréguliers qui ont traversé la Turquie vers les îles grecques. Un tel accord et une telle situation sont dus à l’absence de politique européenne d’asile et de migration unifiée et solidaire.
Il faudrait donc mettre en place un système de répartition juste et équitable des demandeurs d’asile entre les Etats membres. Le problème, c’est que les pays de l’Union ne parviennent pas à trouver d’accord, dans la mesure où certains pays refusent d’accueillir des réfugiés et d’accepter des quotas de répartition.
Euradio : Un accord de répartition des migrants a été trouvé entre l’Allemagne, la Finlande, la France, l’Italie et Malte en septembre dernier. Est-ce un progrès ?
C’est un petit progrès, dans le sens où cet accord établit une répartition automatique des migrants débarquant à Malte ou en Italie. Il s’agit également de garantir aux navires de sauvetage en mer des ports où pouvoir accoster, ce qui permet aussi d’assurer davantage de sécurité aux personnes migrantes secourues en mer. Cet accord montre au moins que certains pays ont compris qu’un partage des responsabilités est nécessaire. Néanmoins, l’accord est limité aux cinq pays que vous avez cités, et concerne les migrants secourus entre la Libye et l’Italie, mais pas ceux secourus à l’est de la Méditerranée.
Par ailleurs, on pouvait espérer que cet accord entre cinq Etats ouvrirait la voie pour un accord au niveau de l’UE, mais le 8 octobre, les ministres de l’Intérieur des Etats membres de l’UE ont échoué à trouver un tel accord. Seuls 12 pays ont déclaré qu’ils seraient prêts à accepter des migrants sauvés en mer, au cas par cas, et une fois certains détails techniques résolus.
En somme, une politique européenne commune d’asile et de migration reste bloquée, alors qu’il s’agit de l’une des priorités des citoyens européens. Confrontations Europe organisera d’ailleurs un séminaire à Athènes la semaine prochaine, portant sur les migrations et où se rencontreront de jeunes citoyens européens et des réfugiés.
Réécoutez cet édito sur le site d’Euradio : https://euradio.fr/2019/10/10/confrontations-europe-ledito-de-lorene-weber/