Auteur : Edouard Simon
Directeur du Bureau de Bruxelles
Jeudi 12 décembre, le Conseil européen devait avoir un échange sur le prochain Cadre Financier Pluriannuel (2021 – 2027). Celui-ci aura été court et n’aura permis de trancher aucun des points actuellement en débat. Eléments d’analyse des enjeux avec Edouard SIMON, directeur du bureau de Bruxelles de Confrontations Europe.
Hier et aujourd’hui, les chefs d’Etats et de Gouvernement des 27 sont réunis pour parler de plusieurs sujets stratégiques pour l’avenir de l’UE, dont la question du niveau et de la répartition du budget de l’UE entre 2021 et 2027 – ce qu’on appelle en jargon bruxellois le Cadre Financier Pluriannuel ou CFP. Or, ce sujet, qui peut apparaître comme relativement rébarbatif, est en fait hautement stratégique. Et, ce matin, j’avais envie de vous parler d’avenir et de ce que nous, Européens, allons pouvoir faire ensemble ou pas.
Je dis bien ‘ce que nous allons faire ensemble ou pas’, car aujourd’hui la négociation entre les 27, mais également entre les différentes institutions européennes semble mal engagée. Une partie du problème vient du départ du Royaume-Uni. Le budget de l’Union est actuellement financé à plus de 70% par des contributions des Etats calculées en fonction de leur PIB. Or, le Royaume-Uni était un fort contributeur et son départ crée un trou de plus de 10 milliards d’euros qu’il faut combler. Mais ce n’est pas là le seul problème. Il faut également compter sur de nouvelles dépenses qui correspondent à de nouvelles priorités politiques – comme le climat ou la défense – qui s’ajoutent aux anciennes qui n’ont pas disparues…
Est-ce que la solution ne serait pas tout simplement de relever les financements des 27 Etats ?
En théorie si. Mais la réalité est plus compliquée, comme vous vous en doutez, car personne ne veut payer plus. Il faut dire que le système actuel favorise les comportements purement comptables de la part des Etats, qui oublient la valeur produite par la mise en commun des ressources.
D’où la proposition de la Commission d’introduire de nouvelles ressources propres, telles qu’une taxe carbone aux frontières ou sur les déchets plastiques, qui permettraient de ne pas augmenter les contributions des Etats membres, voire même de les réduire. Pourtant, plusieurs Etats n’y sont pas favorables et semblent réticents à voir l’Union s’émanciper du contrôle des Etats. On se retrouve donc dans la situation actuelle où il est envisagé de réviser nos ambitions à la baisse sans toutefois faire de choix de coupes claires. Du saupoudrage en somme.
Peut-on espérer voir ce dossier aboutir d’ici à la fin 2020 ? Et, sinon que va-t-il se passer ?
C’est désormais Charles Michel, le nouveau président belge du Conseil européen, qui est en charge des négociations budgétaires et qui se dit déterminer à aboutir à un accord d’ici à la mi-2020. Si tel n’était pas le cas, le budget 2020 serait très probablement renouvelé sur une base annuelle jusqu’au déblocage de la situation. Mais, dans une telle situation, la mise en œuvre des nouvelles priorités politiques de l’UE prendrait du retard. Or, il n’est pas certain, aux vus des nuages qui s’accumulent, que les Européens puissent se le permettre.
Crédit photo : UE