Gabrielle HEYVAERT
Chargée de mission, Énergie et Numérique, Bureau de Bruxelles
Les élections européennes passées, les discussions sur la constitution des groupes politiques du Parlement européen s’intensifient. Le choix du prochain Président de la Commission européenne et des autres postes clefs fait aussi l’objet de négociations entre les dirigeants des Etats membres.
Intéressons-nous tout d’abord au Parlement européen et aux groupes politiques qui le constituent.
376 sièges sont requis pour avoir la majorité au Parlement européen. Pour la première fois depuis 1979, la droite (PPE) et les sociaux-démocrates (S&D) ne seront pas majoritaires à eux deux, avec 327 sièges au total. Ils auront donc besoin d’établir des alliances pour atteindre la majorité, notamment avec l’ADLE et les Verts.
En ce qui concerne les groupes politiques au Parlement européen, chaque groupe est composé d’au moins 25 eurodéputés, issus a minima de sept Etats membres.
Les négociations sont en cours au sein des différents groupes d’ici à la session plénière constitutive du 2 juillet.
Les tractations actuelles, par groupe politique, sont les suivantes :
Le Parti Populaire Européen (PPE), arrivé en tête avec 180 élus, doit désormais élire le bureau de son groupe politique. L’actuel président, Manfred Weber, a été réélu à titre provisoire.
S’agissant des sociaux-démocrates (S&D), le président actuel du groupe, l’Allemand Udo Bullmann, souhaiterait être réélu. Les bons scores des socialistes espagnols et italiens devraient cependant rendre le renouvellement du mandat de Bullman plus compliqué que prévu.
Pour le groupe des libéraux, l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe(ADLE), ce sont la Néerlandaise Sophie in’t Veld, et le Suédois Fredrick Federley, qui se sont déjà officiellement annoncés comme candidats. Mais il faudra composer avec la Française Nathalie Loiseau et l’Allemande Nicola Beer qui seraient aussi en lice.
Concernant les Verts/ALE, les coprésidents du groupe, l’Allemande Ska Keller et le Belge Philippe Lamberts, devraient être reconduits dans leurs fonctions. Notons que les Verts ont réalisé une percée historique, mais uniquement en Europe de l’Ouest.
Le groupe des Conservateurs et Réformistes (ECR), est quant à lui en décrochage. Il perd 11 élus, ce qui est en parti dû au très mauvais score des conservateurs britanniques. Le parti polonais, PiS, semble bien positionné pour prendre la tête du groupe ECR avec 26 eurodéputés.
Concernant l’extrême droite, les discussions se poursuivent pour la formation d’un nouveau groupe nommé Alliance européenne des peuples et des Nations (EAPN). Les souverainistes, conservateurs et eurosceptiques évaluent encore leurs options.
Enfin, pour la gauche radicale, le groupe est passé de 52 à 38 eurodéputés. Il pourrait être dirigé par un Français ou un Grec, les deux délégations nationales ayant remporté chacune six eurodéputés.
Et pour l’exécutif européen, qui succédera à Jean-Claude Juncker ?
Selon le Traité de Lisbonne, le Conseil européen doit « tenir compte des élections européennes » lorsqu’il propose au Parlement européen un candidat à la Présidence de la Commission.
Dans la pratique, en 2014, cela s’est traduit par l’instauration du système des Spitzenkandidaten. Ce sont des candidats têtes de liste des partis politiques européens. Le candidat proposé par le Conseil européen et élu par le Parlement a effectivement été Jean-Claude Juncker, Spitzenkandidat du PPE, parti arrivé en tête aux élections.
En 2019, les partis politiques européens ont de nouveau présenté des Spitzenkandidaten. Le PPE étant de nouveau arrivé en tête, on pourrait donc s’attendre à ce que Manfred Weber, leur Spitzenkandidat, soit élu.
Toutefois, les réticences du Conseil européen à l’égard de ce système et le caractère clivant au sein du PE au sujet de la candidature de Weber rendent très incertain le fait que le processus des Spitzenkandidaten aille jusqu’au bout.
D’autres candidats, déclarés ou putatifs, concurrencent sérieusement Manfred Weber : le principal d’entre eux est le Français Michel Barnier, qui a fait l’unité auprès des européens pour son rôle dans les négociations à propos du Brexit, mais aussi de la Commissaire à la concurrence, Margareth Vestager.
Les autres postes clefs, qui font actuellement l’objet d’âpres négociations sont les postes de Président du Parlement européen, de la Banque Centrale européenne, du Conseil européen, ainsi le poste de Haut Représentant pour les Affaires étrangères.
Pour conclure, il faudrait tirer les leçons de l’échec du système des Spitzenkandidaten pour réformer la représentation directe des citoyens au sein de l’UE. Des sièges attribués à des listes transnationales européennes pourraient faire évoluer les enjeux électoraux.