Damien PÉRISSÉ
Directeur en charge des Affaires maritimes à la CRPM (Conférence des Régions Périphériques Maritimes d’Europe)
En écho à l’appel de Confrontations Europe pour une stratégie industrielle européenne, le leadership européen en matière d’industries maritimes et notamment énergétiques passe par des coopérations avec les régions.
La mer, domaine d’intérêt stratégique européen
Dans sa position de mars 2017 « Les Mers et les Océans, sujet d’avenir pour l’Union européenne », la Conférence des régions périphériques maritimes (CRPM) appelle l’Europe à amplifier son soutien au développement des industries maritimes. Cette position fait écho à l’appel lancé par Confrontations Europe en 2012 pour une stratégie européenne de compétitivité industrielle intégrée et solidaire.
Les mers et les océans représentent de fait un gigantesque potentiel de croissance et d’emplois. Le rapport « Ocean Economy in 2030 » de l’OCDE, publié en avril 2016, indique qu’en 2010, l’économie de la mer représentait 1 500 milliards de dollars, soit 2,5 % de la richesse mondiale en 2010. Cette part augmente rapidement et pourrait doubler d’ici 2030. Cette dynamique concerne directement l’Europe où, selon la Commission européenne, l’économie de la mer représente un nombre croissant d’emploi, aujourd’hui estimé à 5 millions.
Avec d’autres composantes des industries maritimes, les énergies marines contribuent pour une large part à cet élan. Leur développement contribuera à atteindre les objectifs européens d’indépendance énergétique, de recours aux énergies renouvelables, et de lutte contre le réchauffement climatique.
Investissement et formation
L’Europe dispose d’un leadership mondial dans ce domaine. Si elle souhaite le conserver, elle devra amplifier son action. À titre d’exemple, les objectifs de 27 % d’énergies renouvelables en Europe en 2030 proposés par la Commission sont insuffisants pour stimuler le développement industriel lié aux énergies marines. Par ailleurs, soutenir ce développement industriel suppose d’assouplir le principe de neutralité technologique, proposé en novembre 2016, dans le Paquet Énergie. Les États membres qui le souhaitent doivent pouvoir mettre en place des conditions d’accès au marché plus favorables à l’électricité produite par les énergies marines.
L’efficacité de l’action de l’Europe suppose également un partenariat renforcé avec les régions. Les investissements et la formation sont deux domaines autour desquels ce partenariat peut se nouer.
Les régions investissent aujourd’hui fortement dans les industries maritimes. Leurs stratégies de spécialisation, qui orientent l’utilisation des fonds structurels, reflètent les priorités des entreprises et des territoires. L’Europe peut s’appuyer sur elles, notamment pour mettre en évidence des carences dans le soutien financier aux projets maritimes risqués, et développer des dispositifs aptes à y remédier. Ces dispositifs peuvent être mis en place dans le cadre des plateformes territoriales prévues par le plan Juncker. Les stratégies des régions soutiennent également un ensemble d’investissements tels que les projets de test et de démonstration de technologies maritimes, en complémentarité de programmes européens tels que NER 300(1).
Les stratégies de spécialisation des régions permettent aussi d’orienter des collaborations à l’échelle des bassins maritimes et du territoire européen. À titre d’exemple, le projet Interreg Europe CLIPPER(2), piloté par la Région Pays de la Loire, rassemble sept régions d’Europe pour travailler sur leurs politiques de soutien au PMEs des industries maritimes. L’Europe peut s’inspirer de ces collaborations et des stratégies de bassin maritimes pour orienter ses programmes collaboratifs, dont Horizon 2020.
Investir dans la formation doit également être une priorité. La Conférence des régions périphériques maritimes (CRPM) est fortement engagée dans ce domaine à travers son initiative « Vasco da Gama ». L’Europe doit développer une dimension maritime de la Stratégie pour les Compétences en Europe. Les initiatives « Blueprint maritime » et « Carrières Bleues » sont des éléments positifs en ce sens. Les industries maritimes représentent une perspective positive dont l’Europe doit se saisir pleinement.
1) Le programme NER 300 est conçu comme un catalyseur pour la démonstration de la capture et du stockage du carbone (CSC) et des technologies novatrices d’énergie renouvelable à l’échelle commerciale au sein de l’Union européenne.
2) L’objectif affiché du projet européen CLIPPER (Creating a Leadership for Maritime industries – New opportunities in Europe) est d’améliorer les politiques publiques de soutien aux industries maritimes.