Après la Grèce, où se cache la prochaine crise ?

Carole ULMER

Directrice des études à Confrontations Europe

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Alors que les dirigeants européens s’attèlent à l’explosif dossier grec (cf. Colonne p.1), la peur du Grexit et de la contagion refont violemment surface. Renforcer l’Union économique et monétaire est indéniablement un chantier central pour les mois à venir, Confrontations Europe y reviendra. Mais déjà des signaux alarmants se font jour et laissent poindre de nouvelles menaces sur la croissance. Où se situent les nœuds de tensions ? Où se cache la prochaine crise ?
Un premier point concerne la conjoncture internationale: le professeur Aglietta évoque l’explosion de la dette globale des secteurs non financiers, qui a continué de gonfler après 2007, notamment les dettes publiques ce qui prive les Etats de capacités d’action. C’est notamment le cas des pays émergents dont l’endettement s’affiche en dollars. Un scénario pessimiste de rechute pourrait ainsi être lié à un nouveau cycle du dollar, c’est-à-dire aux distorsions de changes et aux déséquilibres mondiaux de balances des paiements ainsi créés. Actuellement, on constate une détérioration des profits des entreprises américaines et une reprise du déficit américain. L’économie américaine est-elle suffisamment robuste pour tenir face à cette appréciation extrême du dollar ?
Une seconde série d’interrogations porte sur la soutenabilité des politiques monétaires actuelles et les effets de la régulation financière : n’avons-nous pas ainsi nourri des effets indésirables, comme l’évoque un rapport récent de SwissRe ? La remontée des risques est masquée par le déversement massif de liquidités émises. Et les marchés financiers se trouvent en plein paradoxe, comme le souligne l’économiste Nouriel Roubini : jamais la liquidité macroéconomique n’a été aussi abondante et pourtant la liquidité est devenue plus réduite sur plusieurs marchés (de dettes souveraines, de change, et même de crédit). Jamie Dimon de JP Morgan met ainsi en garde contre la volatilité croissante des marchés de la dette publique et des changes : en quelques heures, les marchés des bons du Trésor américain ou du Bund allemand sont secoués par de fortes turbulences. Or, comme les banques centrales achètent massivement de la dette publique, les investisseurs pourraient se retrouver à court de valeurs refuge pour leur portefeuille, valeurs qu’ils sont tenus d’avoir en raison de la régulation. Ces secousses provoquent des flash crashs dont la gravité s’accentue en raison du manque de liquidité. Second dysfonctionnement : la masse de liquidités injectées ne s’investit pas dans l’économie réelle, elle vient gonfler les valorisations sur les marchés financiers, créant ainsi un phénomène de bulles. Tous les indices témoignent de ce phénomène de surchauffe, notamment dans les marchés immobilier et actions. Les entreprises n’investissent pas et préfèrent distribuer des dividendes. Larry Flinck, président de Blackrock, souligne le risque de ce niveau excessif des dividendes et des rachats d’actions. A force de vouloir relancer l’économie par le crédit, les banques centrales ont finalement provoqué un gonflement artificiel du prix des actifs.
La troisième inquiétude concerne l’accroissement des inégalités au niveau mondial (cf. colonne).
Un dernier point que nous soulèverons ici : l’idée d’une insuffisance de la demande au niveau mondial. En clair, beaucoup d’argent ne sait pas où s’investir. Il est plus que jamais temps d’investir. Pourtant, ces investissements n’ont pas lieu. Pourquoi ? Une mauvaise gouvernance budgétaire (comment investir alors que nous avons 95% de dette/PIB ?) et une mauvaise gouvernance institutionnelle et politique (saurions-nous dépenser efficacement 50 milliards d’euros si nous les avions ?) sont deux facteurs évoqués pour expliquer ces blocages.
Il faudrait terminer par la difficile question de la baisse des gains de productivité. Tensions sur des balances des paiements au niveau mondial, paradoxes sur les marchés financiers, freins dans le partage de la richesse et panne de projets : autant de terreaux de nos futures crises, sur lesquels on aimerait aussi voir nos dirigeants se pencher avec diligence. Sans parler des épineux dossiers de l’immigration et de la crise du politique…

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Un monde de plus en plus inégalitaire
L’accroissement des inégalités au niveau mondial inquiète de plus en plus les instances internationales. Via les pressions déflationnistes et la baisse concomitante des taux d’intérêt, les détenteurs de patrimoine sont les principaux bénéficiaires de la période récente.
Après l’OCDE, c’est maintenant au FMI  de se soucier de la question : les inégalités sont l’une des causes importantes de la stagnation globale de l’économie. Selon l’étude, augmenter de 1 point de PIB les revenus des 1% les plus riches, fait décroître la croissance mondiale de 0.08 point ; alors que la même augmentation pour les 20% les plus pauvres augmente la croissance de 0.38 point. Une petite moitié de la population (les « pauvres » et les « classes moyennes ») a maintenant du mal à éduquer ses enfants…
Si les fruits de la prospérité ne sont plus partagés, on imagine les tensions sociétales qui couvent – tensions qui nourrissent un climat d’aversion au risque. De là une nécessaire prise de conscience d’un besoin accru d’investissements d’intérêt général essentiels, notamment pour l’accès à la formation, à l’éducation et à la santé.
L’Europe a, à nos yeux, son rôle à jouer dans l’impulsion de tels engagements qui auraient de plus le mérite de souligner plus directement aux yeux des citoyens, en quoi l’Europe œuvre pour eux.
 
Carole ULMER.

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