Réciprocité : amélioration de l’accès des entreprises aux marchés publics

Kenny ABBEY et Dasha BESPYATOVA

Confrontations Europe

Véronique Ollivier, directrice du bureau de Bruxelles – Confrontations Europe. Marc Poulain, unité Marchés publics – DG Commerce, Commission européenne. Ward Moehlmann, unité Dimension internationale desmarchés publics – DG Marché intérieur et Services, Commission européenne. Ulrich Paetzold, Directeur Général de la Fédération de l’Industrie Européenne de la Construction (FIEC). Jean-Paul Thuillier, Ministre conseiller de la politique commerciale, Représentation de la France auprès de l’UE. Adèle Naudy-Chambaud, Conseillère affaires européennes, Alstom.

Enjeux et objectifs
– Le marché européen est largement ouvert, ce n’est pas le cas chez nos partenaires commerciaux (notamment en Chine).
– Il n’existe pas de politique européenne commune des marchés publics extérieurs.
Les autorités adjudicatrices agissent en se basant sur la législation nationale et les accords internationaux et cela crée une insécurité juridique et une fragmentation du marché intérieur.
-De plus, les acteurs économiques européens ont besoin d’un cadre juridique commun qui va leur donner une base dans les négociations commerciales internationales, comme cela existe aux Etats-Unis (« Buy American Act »), en Chine ou en Inde.
> Deux objectifs : une régulation pour éviter la fragmentation du marché intérieur + outil de politique commerciale visant à favoriser la négociation avec les pays tiers (Effet de levier)
La question de la base juridique (marché ouvert ou non) est posée par certains acteurs ; la Commission analyse la demande.
La proposition consiste en 3 piliers:

  1. Exclusion, par les pouvoirs adjudicateurs et entités adjudicatrices, d’offres comprenant des produits et services non couverts (art. 6), sur analyse de la Commission, pour les offres de plus de 5 millions d’euros.
  2. Enquête de la Commission, concertation et mesures limitant provisoirement l’accès de produits et services non couverts aux marchés publics de l’UE (art. 8 et 10)

Etape 1 : Enquête relative à l’accès d’opérateurs économiques, de produits et de services de l’Union aux marchés publics de pays tiers.
La Commission peut à tout moment, de sa propre initiative ou sur demande de parties intéressées ou d’un État membre, ouvrir une enquête externe sur des mesures restrictives présumées en matière de passation de marchés, dès lors qu’elle estime qu’une telle action va dans le sens des intérêts de l’Union. Cela veut dire que toute décision relève de sa volonté propre et il n’y a pas d’autres mécanismes prévus pour influencer sa décision. Cela montre également le caractère unanime d’une telle décision (Ulrich Paetzold, FIEC).
Etape 2 : concertation avec un pays tiers
La Commission peut inviter un pays tiers à engager une concertation afin que les opérateurs économiques puissent participer aux procédures de passation de marchés (lettre d’invitation). Ce dispositif montre que la Commission n’est pas obligée de limiter l’accès au marché.
Etape 3 : Adoption de mesures proportionnées limitant l’accès de produits et services non couverts aux marchés publics de l’Union. Cette 3ème étape est, aux yeux de la Commission, une mesure de dernier recours.
Offres anormalement basses (art.7) : dans le cas d’offres anormalement basses comprenant plus de 50% de biens ou services extérieurs non couverts, l’autorité contractante doit transmettre l’information fournie par l’offrant le plus bas aux autres offrants. Il n’y a pas d’obligation de rejet de l’offre.
Points de débat et Positions
La proposition de la commission est-elle suffisamment « musclée ou trop soft » ? On peut à la fois ne pas avoir l’accès aux marchés extérieurs qui sont fermés ; de l’autre, on craint des répercussions sur le marché intérieur. Certains acteurs reprochent le manque d’outils pour afficher une réelle intention de se défendre (il faut être en capacité de réellement prendre des mesures restrictives). D’autres acteurs craignent, dans le contexte de crise, des représailles économiques et des mesures protectionnistes de réaction de la part des pays tiers. Le risque est d’avoir une première étape d’information qui fonctionne mal, puis un temps de négociation long. Dans l’attente, l’asymétrie des marchés va s’aggraver.
-certains acteurs craignent une charge administrative lourde du fait de ces procédures.
– Caractère volontaire des procédures remis en question, ainsi que la suprématie de la Commission dans le processus de décision (libre arbitre laissé pour choisir ou non de passer à l’étape ultérieure) par certains acteurs.
Offre anormalement basse : interférence avec le problème d’aides d’état
Ce type d’offres peut créer des pratiques déloyales de fournisseurs et de prestataires de services qui ne respectent pas les critères sociaux et environnementaux. Il peut en même temps limiter l’accès des PME aux marchés publics.
Selon la FIEC, cette norme ouvre la voie aux autorités adjudicatrices qui décident à ne pas appliquer l’art. 6 et choisir une offre en se basant sur le critère du prix.
-Le texte a suscité des réactions diverses des Etats membres au Conseil, bien que M. Barroso et M. Van Rompuy l’aient soutenu. Lors de la réunion du 10 juillet, les représentants des RP ont confirmé que le texte est discuté au sein de leurs gouvernements, en se concentrant avant tout sur le principe de l’existence même du texte et en ne rentrant pour le moment pas dans les dispositifs techniques.

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