L’enjeu de la citoyenneté européenne

Marcel GRIGNARD

Président de Confrontations Europe

Au lendemain des attentats qui ont ensanglanté Paris en janvier, nous avons très vite dit que les  valeurs mises en cause étaient celles fondatrices de l’Europe. Nous avons considéré que la mobilisation citoyenne qui dépassait les frontières en était l’expression et qu’elle interpelait les responsables politiques, économiques, associatifs… qu’ils soient nationaux ou européens.
L’Europe est confrontée à la menace terroriste sur son propre territoire. Menace qu’on ne peut déconnecter de ce qu’est le terrorisme en Afrique et en face duquel la France se trouve bien seule parmi les Européens auprès des gouvernements des pays les plus  concernés.
L’Europe est confrontée à la violence armée à la frontière ukrainienne et les efforts louables de F. Hollande et A. Merkel ne garantissent pas un cessez-le-feu durable. On est encore très loin d’une relation de voisinage permettant de réduire l’écart de développement économique, social, démocratique sur l’ensemble de l’Europe.
L’Europe se doit d’agir pour assurer la paix, la démocratie et la sécurité de ses citoyens. Et renforcer la citoyenneté européenne, ce sentiment d’appartenance à une société au sein de laquelle nous mettons en commun une partie de nos destins, c’est renforcer la légitimité du pouvoir politique à agir en son nom.
La citoyenneté européenne bouge au gré des composantes de l’Union européenne, se renforce par les difficultés abordées ensemble et les actes politiques posés pour y faire face. Elle ne nie pas les différences. Si les valeurs de tolérance, de liberté d’expression, de respect de l’autre sont partagées, elles se traduisent de manière diverses dans nos sociétés. C’est en particulier le cas du rapport entre Etat et religion que nous avons voulu éclairer dans ce numéro d’interface.
La tolérance, c’est d’abord admettre la différence et la comprendre. Il n’y a pas de compromis solide, il  n’y a pas de solidarité assumée et durable si on néglige cette étape.
Or, une des raisons de l’inconsistance des réponses politiques européennes, c’est ce peu d’efforts faits  pour connaître et comprendre les réalités économiques, sociales, sociétales, politiques des autres Européens. Prenons un exemple très concret. On en écrit des pages sur la concurrence sociale intra-européenne, sur la comparaison France/Allemagne et en ce début d’année les médias relaient la mise en place d’un salaire minimum en Allemagne. Mais, la grande majorité des médias français titrent « un Smic en Allemagne ». Transposer un concept français pour illustrer un dispositif allemand qui ne lui ressemble pas est un raccourci qui n’est pas loin du mépris de l’idée d’Europe.
En effet, depuis des décennies patronat et syndicats décident en toute autonomie des salaires minimum de branche en Allemagne. C’est suite à la forte progression du nombre de salariés à très bas salaires et au fait que près d’un salarié sur deux n’est pas couvert par un accord de branche qu’a été institué ce salaire minimum dont le niveau a été discuté avec les partenaires sociaux. Si l’objectif du salaire  minimum est le même des deux côtés du Rhin, le mécanisme qui le construit et la manière dont les niveaux sont construits sont très différents.
Mais si, sur quelque chose d’assez simple et factuel on ne cherche pas à comprendre pour mieux faire ensemble, comment prétendre y parvenir sur des sujets plus complexes ?

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