La nécessaire extension du Fonds Européen pour les Investissements Stratégiques

Rick WATSON

Directeur général, en charge des marchés de capitaux, Association des marchés financiers en Europe

Le groupe de travail (GT) sur les infrastructures AFME-ICMA s’est félicité du lancement du Fonds européen d’investissements stratégiques initial en 2015, qui devait attirer les investisseurs privés. Objectif atteint, semble-t-il : dans son rapport d’évaluation, la BEI concluait que 60 % des investissements potentiellement mobilisés par le FEIS provenaient du secteur privé (1). Ces nouveaux investissements pourraient créer 1,4 millions d’emplois (2).

Le GT sectoriel, réunissant divers arrangeurs, investisseurs, agences de notation de crédit et cabinets juridiques, a activement soutenu le lancement du FEIS en publiant le Guide AFME-ICMA du financement des infrastructures (3). Son objectif : aider les organismes d’achat et les commanditaires à obtenir le meilleur rapport qualité-prix en tenant compte du processus d’attribution, des investisseurs du secteur, d’exemples de transactions conclues ou non par le BEI dans différents secteurs, du rehaussement du crédit, et des problématiques juridiques et relatives aux notations. Le guide sensibilise également sur les modalités des prêts bancaires, le marché de la dette privée et les marchés de capitaux publics. Ainsi, un prêt octroyé par une banque ou un placement privé auprès d’investisseurs peut présenter une certaine souplesse en termes de calendrier des prélèvements, de confidentialité et de dérogation aux conditions de financement.
Toutefois, malgré une reprise de l’économie européenne, les investissements privés restent inférieurs au niveau de 2008 : ils ont baissé de 22,5 % du PIB en 2008 à 19,5 % en 2015 dans les 28 États membres (4). La prolongation du FEIS est donc nécessaire. Elle devrait s’accompagner d’une meilleure information des municipalités européennes et des adjudicataires de marchés quant aux avantages des transactions PPP par rapport au financement par des fonds publics.
Le rôle des banques nationales de développement (BND) est également essentiel. L’UE et les gouvernements nationaux, par le biais du FEIS, ont soutenu des projets qui ne seraient pas viables financièrement, notamment lorsque le risque usage/demande ne peut être quantifié, ils devraient en soutenir davantage. Ce risque pourrait être atténué par l’utilisation partielle des garanties fournies par les BND : une transaction non négociable pourrait devenir négociable pour les investisseurs institutionnels.
L’extension du FEIS devrait se poursuivre en complément des deux autres piliers du plan d’investissement pour l’Europe. Le deuxième pilier se concentre sur les services de conseil et d’information. La qualité des données du Portail européen de projets d’investissement (EIPP) et le rôle de la Plateforme européenne de conseil en investissement (EIAH) sont des éléments cruciaux de la sensibilisation des adjudicataires de marchés publics. Cela est valable pour les grands États membres comme pour les 11 plus petits (5)(6).
Le troisième pilier vise à lever les obstacles aux investissements. La Commission a récemment défini une catégorie d’actifs pour les investissements d’infrastructure pour laquelle les assureurs bénéficieraient d’une réduction des charges de capital. L’objectif est d’attirer les assureurs vers cette catégorie d’actifs. Toutefois, il y a quatre fois plus d’investissements dans des entreprises qui portent des projets d’infrastructures et n’entrent pas dans ce cadre (7). Une réduction des charges de capital pour de tels investissements aurait un impact substantiel sur le financement des infrastructures et sur l’injection supplémentaire de capitaux privés dans les projets d’infrastructures par le biais du FEIS.
L’extension du FEIS est la clé vers une hausse de la croissance et de l’emploi en Europe car il renforce les injections de capitaux privés dans des projets qui ne seraient pas financièrement viables autrement dans les 28 pays de l’UE.

(1) Rapport d’évaluation indépendant de la BEI : « Le FEIS est bien parti pour mobiliser les capitaux privés », 6 octobre 2016.
(2) Voir le point (1)
(3) http://www.afme.eu/globalassets/downloads/afme-reports/afme_guide_to_infrastructure_financing2.pdf
(4) Eurostat
(5) République tchèque, Hongrie, Pologne, Slovaquie, Bulgarie, Croatie, Roumanie, Slovénie, Estonie, Lettonie et Lituanie.
(6) AFME-New Financial, The benefits of capital markets to high potential EU economies, nov. 2016.
(7) Moody’s, Bridging $1 trillion infrastructure gap needs multi-pronged approach, 24 février 2016 (sur les projets européens notés par Moody’s en 2012-14).

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