En Allemagne, une politique d’Etat en faveur de l’intégration

Rose LANGER

Chef de Département au ministère du Travail et des Affaires sociales (Allemagne)

En 2015, Angela Merkel a ouvert les portes de son pays aux réfugiés apparaissant comme la seule dirigeante optant pour une politique humaniste au sein de la « forteresse Europe ». Comment, deux ans plus tard, se déroule l’intégration de ces centaines de milliers de réfugiés ?

En 2015 et 2016, 1,2 million de demandes d’asile ont été déposées en Allemagne. L’intégration des nombreux réfugiés arrivés en 2015 et en 2016 constitue un véritable défi pour le gouvernement à tous les niveaux (fédération, Länder, et communes), mais aussi pour les citoyens. En mai 2016, le gouvernement allemand a adopté une stratégie commune d’intégration de tous les immigrés vivant sur le territoire. Cette stratégie fait appel à la responsabilité de quasiment tous les ministères fédéraux, que ce soit dans les domaines de l’apprentissage de la langue, de l’éducation, de la formation professionnelle, de l’emploi ou encore de l’intégration sociale.

Le premier facteur-clef d’intégration est l’apprentissage de la langue. C’est pourquoi l’Allemagne propose à chaque réfugié 700 heures de « cours d’intégration ». Cette formation comprend 600 heures des cours de langue de niveau « débutants » ou « intermédiaires ». 100 autres heures sont consacrées à un cours dit « d’orientation » dont l’objectif est de donner des bases historiques, culturelles et juridiques aux nouveaux arrivants, et de leur expliquer les valeurs de l’Allemagne. En 2016, ces cours ont été suivis par 430 000 participants(1).

Des programmes personnalisés de 900 heures peuvent être organisés pour répondre à des besoins plus particuliers (cours d’alphabétisation, cours d’apprentissage d’un second alphabet, cours d’intégration destinés aux moins de 27 ans qui ne sont pas tenus d’aller à l’école, cours pour les parents ou les femmes dans l’impossibilité de suivre un cours d’intégration pour des raisons familiales ou culturelles, cours intensif pour les personnes capables de progresser plus rapidement, cours pour les personnes souffrant de handicap).

Les participants au « cours d’intégration » sont censés atteindre le niveau B1, un niveau de langue qui leur permet de faire face à toutes les situations du quotidien. Tout au long du processus d’intégration, des conseillers spécialisés guident les migrants adultes en adaptant leur approche à chaque cas et en les accompagnant étape par étape. L’objectif est de permettre aux nouveaux arrivants de devenir autonomes et d’être mis en contact avec les services sociaux le plus vite possible.

Accès au marché du travail

Les personnes bénéficiant du droit d’asile, réfugiés au sens de la Convention de Genève de 1951 ou d’une protection subsidiaire(2) ont accès au marché du travail. Cet accès est aussi étendu à toute personne qui arrive sur le sol allemand via des programmes humanitaires ou sur admission qui est admise sur le territoire pour des motifs humanitaires, politiques ou de droit international. Toutes ces personnes ont droit à des prestations de revenu minimum et des aides facilitant leur intégration au marché du travail.

Afin d’accélérer l’accès au marché du travail des réfugiés, en juillet 2016, le ministère fédéral du Travail et des Affaires sociales a aussi mis en place des cours d’allemand ­spécifiquement liés à un secteur professionnel. Cette formation est plus poussée que les cours ­d’inté­gration : elle aide les parti­cipants à passer du niveau d’allemand B1 au niveau C2 afin d’accroître leurs chances sur le marché du travail. Une mesure d’autant plus importante que selon des données UE/OCDE, l’intégration sur le marché du travail est directement liée à la bonne maîtrise de la langue : en Allemagne, 65 % des réfugiés ayant un niveau de langue intermédiaire ont un emploi. Le taux tombe à 28 % pour les nouveaux arrivants n’ayant qu’un niveau de langue basique(3)…

1) www.la-croix.com/Monde/Europe/En-Allemagne-cours-integration-pour-migrants-2016-02-22-1200741838

2) Statut octroyé à une personne qui ne peut être considérée comme réfugié mais que l’Union européenne ne renvoie pas dans son pays car elle risquerait d’y subir des violences.

3) Integrating refugees into the labour market – Where does Germany stand? Sept. 2017, OCDE.

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